vendredi 16 août 2013

R.E.S.P.E.C.T

"R-E-S-P-E-C-T, find out what it means to me. R-E-S-P-E-C-T, take care, TCB" (Respect, Aretha Franklin)
(Le respect, découvre ce que cela veut dire pour moi. Respecter, prendre soin) (TCB=Take care of Business)

Soirée de mariage dans la famille.
Tout le monde est assis à sa table comme le voulait le plan de table (qui, au passage, est l'une des choses les plus difficiles dans l'organisation du mariage).
La valse d'ouverture du bal par les mariés.
Une tradition que je trouve plaisante, surtout quand le morceau est bien choisi.

Puis, quelques tangos.
Bon, c'est pas du tout mon style de musique.
Mais il en faut pour tous les goûts.

Puis quelques paso doble.
Toujours pas mon style, et en plus je ne sais pas le danser.

Mon fils vient me voir et me demande "Euh, c'est quand qu'ils vont mettre de la vraie musique ?"
Oui, mon fils est doué en diplomatie, comme tout garçon de 10 ans. Il va falloir que je lui apprenne comment parler aux femmes tiens, sinon, niveau drague, ça va être difficile.
Enfin, bon, je ne suis pas sûr d'être la personne la plus compétente en la matière.

Je lui explique donc que dans les soirées, c'est souvent comme cela que tout se passe : l'ouverture du bal, puis quelques morceaux pour nos aînés avant de la musique plus récente.

"De la musique pour les vieux, en gros ?"

Oui, bon, c'est un peu ce que je voulais dire de façon enrobée.
Mais l'idée est là.
Faire plaisir aux vieilles générations, puis aux plus jeunes.

"La ronde infinie, de ce cycle éternel, c'est l'histoire, l'histoire de la vie." (L'histoire de la vie, Le Roi Lion)

Est-ce que les grands-parents présents ce soir là ont tenu les mêmes propos étant jeunes ?
C'était quoi la "musique pour les vieux" quand eux étaient jeunes ?
Est-ce qu'ils se disaient que la musique qu'ils aimaient alors vieillirait comme eux et en se démodant deviendrait un peu ringarde pour les jeunes ?

"Etre grand-parent, c'est plein de petits bonheurs. Tu te lèves tôt pour allonger tes jours, et tu prends le temps de tomber en amour. T'auras jamais compris à quoi ça t'a servi, mais tu n'as plus envie, vraiment de le savoir. Tu as connu l'amour et quand tu l'apprécies, faut que le cadran sonne la fin de l'histoire." (L'adolescent X, Lynda Lemay)

Oui plein de petits bonheurs.
Des petits-enfants avec une musique différente, des goûts différents, des vies différentes.
Ils sont vieux mais ont été jeunes.
Ils ont la sagesse de leur expérience et de leur âge.
Et tant de souvenirs.

Alors, pourquoi diable, parfois, avons-nous tendance à oublier tout cela ??

J'avais au téléphone une collègue hospitalière il y a quelques jours, me décrivant le comportement d'une patiente dont je suis le médecin traitant, et qui était dans son service.
Aux antipodes de ce que je connais d'elle.
J'étais un peu surpris, mais, après tout, je ne la vois qu'une fois par mois, alors que ma collègue la voyait tous les jours.
Ceci expliquait peut-être cela.
Elle voulait rentrer chez elle, et s'énervait qu'on ne lui en laisse pas la possibilité alors qu'elle avait parfaitement récupéré de son intervention chirurgicale. Même si c'est un peu plus tôt que "la normale".
Rentrer chez elle, dans ses murs, au milieu de ses souvenirs.

Et là, une bande de jeunes en blouse blanche lui dit "oh non mamie, tu vas rester, c'est pas toi qui décide".
Où est le respect finalement ? Et je ne jette pas la pierre aux collègues, c'est facile d'avoir mon point de vue quand on regarde cela d'un œil extérieur je suppose.

Quand le patient a un comportement agressif ou dangereux pour lui-même, je suis d'accord qu'il n'y a pas le choix.
Mais quand le patient va à peu près bien, ou du moins aussi bien que possible pour son âge et ses antécédents ?

Je dirai quoi, moi, si un jour on veut me priver de ma liberté de décider au nom de je ne sais quel prétexte ?
Je serai sûrement invivable, râleur (enfin, je veux dire, plus que d'habitude encore)

J'ai rendu visite à cette patiente à son retour.
Elle était ravie, souriante, telle que je l'ai toujours connue. J'ai essayé de prendre le temps chez elle. Elle a fini par me dire qu'elle n'aimait pas la nourriture de l'hôpital, et s'y sentait diminuée.
Et puis elle n'avait pas son verre de vin le midi. Et elle apprécie ce verre de vin.
A 87 ans, je ne vois pas au nom de quoi je vais le lui interdire.

"I dont steal and I dont lie, but I can feel and I can cry. A fact I'll bet you never knew. But to cry in front of you, that's the worse thing I could do." (There are worst things I could do, Grease)
(Je ne vole pas et je ne mens pas, mais j'ai des sentiments et je peux pleurer. Je parierais que tu ne l'aurais jamais imaginé. Mais pleurer en face de toi, c'est la pire des choses que je puisse faire"

Elles ont souvent le sourire aux lèvres les personnes âgées que l'on croise dans les mariages.
Peu importe les épreuves, ils ou elles sont heureux. Heureux de l'instant présent.
Même si peu de gens dansent encore avec eux sur les tangos et les paso doble.
Même si au fond d'eux, il y a peut-être un petit pincement au cœur.

Oh ? Mais ? Qu'est-ce que j'entends ?
C'est le début de la musique des années 80 ! J'adore ! C'est marrant, j'aurais juré qu'il y aurait eu plus de monde que cela debout pour danser... Ah, les jeunes...

1 commentaire:

  1. Nous sommes les jeunes d'hier et les vieux de demain :-)
    Très chouette billet, merci!

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