samedi 30 juin 2012

Nice 2012


C’est chaque fois la même histoire. Cela en deviendrait presque lassant tellement je suis prévisible. La veille du départ, je me pose toujours la même question : Pourquoi me suis-je inscrit à ce congrès ?
 
Après tout, des formations médicales, on en trouve un peu partout, y compris à quelques kilomètres de chez moi.

Alors pourquoi celle-là ? Bon, les deux années précédentes, j’étais revenu enchanté, bien sûr, mais ça doit être mon caractère un peu casanier qui veut me donne ce doute sur mon envie de partir…

Et puis, le jour J arrive, la veille du début officiel du congrès. Quelques réunions, on s’acclimate. J’ai fait le trajet avec des collègues de Fac qui sont plus devenus des amis que de simples collègues. La première soirée s’étiole paisiblement. Je tente de ne pas me coucher trop tard (c’est plus de mon âge de prendre le train à 06h…)

Tadam ! Ouverture officielle du congrès et là, premier choc : plus de 2500 participants. 2500 médecins généralistes au même endroit ? C’est bien une des rares fois que j’en vois autant d’un coup. (Espérons qu’il ne nous arrive rien d’ailleurs pendant ce congrès, sinon, bonjour le système de santé français !)
Serions-nous donc nombreux à exercer ce merveilleux métier et à venir se former pour essayer de le faire encore mieux ?

Commencent les séances et les ateliers. On me parle de médecine générale. Entendons-nous bien, il ne s’agit pas de spécialistes d’une autre discipline que la mienne qui viendraient m’apprendre à pratiquer un métier qu’ils n’exercent pas. Non, ce sont des généralistes comme moi, confrontés aux mêmes problématiques. Ils me parlent « un langage » que je connais et comprends.
La séance se termine, très enrichissante, et je me dis que si la suite est du même niveau, je devrais y trouver mon compte sans trop de problème.

Je me souviens que l’année dernière, après une petite pause, j’avais entendu parler médecine générale avec un accent québécois très « glamour » comme ils disent là-bas. Ils m’avaient apporté un regard différent sur ce métier que nous avons en commun. Et je m’étais aperçu que nous partagions beaucoup de points communs concernant ce qu’ils appellent « la médecine familiale » chez eux …

Arrive la pause repas… tout a été prévu par les organisateurs du congrès, même si c’est un peu la cohue à certains endroits. Mais rien ne presse. J’ai donc tout le temps de discuter avec les collègues du Collège des Enseignants de Médecine Générale de Lille, mais également au détour d’une allée, avec les responsables du Collège National. Et il faut reconnaître que c’est un réel plaisir de mettre un visage sur un nom quand en plus ce visage est souriant. Finalement, mes inquiétudes de la veille semblent déjà lointaines.

Au milieu de tout cela, je trouve (ou plutôt je prends) le temps de Tweeter… ça c’est la nouveauté de l’année en ce qui me concerne. Une keynote entièrement en anglais. Je prends un pied phénoménal (ben oui, en fait, depuis que je suis en 4è je regarde des films en VO sans sous-titre… et ben là c’est pareil). Je re-tweete. Je sors de l’amphi. Re-tweet cette fois-ci @Borée pour savoir où est vendu son livre (je me suis retenu de l’acheter avant le congrès, parce qu’ici j’allais pouvoir le faire dédicacer : la classe !). Et par hasard, je le rencontre en chemin. Mais aussi Gélule, qui m’avait envoyé un petit message sympa déjà lors du congrès de Bordeaux après ma présentation orale (j’étais plutôt stressé, faut bien avouer, mais apparemment, j’avais l’air décontracté… ça sert d’avoir fait un peu de théâtre…). Nous avons discuté. Ils ont dû me prendre, avec Dr Foulard, pour un gamin que l’on aurait déposé dans un magasin de bonbons : j’étais tellement content de les rencontrer, eux, que je connaissais par leurs blogs, que de les voir dans la vraie vie m’a fait perdre mon flegme « habituel ». (Au fait, désolé de vous avoir monopolisé comme ça).

Après cet après-midi studieux, retour à l’hôtel. Ah c’est vrai, il fait beau à Nice ! On pourrait même manger en terrasse ce soir, non ? Comme si quelqu’un avait lu dans mes pensées, on me propose un rendez-vous le soir même pour un repas entre enseignants.

Un petit repas en terrasse, pour discuter de l’enseignement de la Médecine Générale, et continuer cette journée déjà bien remplie ? Je ne dis pas non. Et puis, comme je l’ai dit, ils sont tous devenus des amis plutôt que des collègues enseignants.
Comme si cette journée n’avait pas été suffisamment ponctuée d’évènements étonnants, le repas réserve lui aussi quelques surprises. Je m’attendais quand même à discuter d’enseignement (vous savez, avec plein de mots compliqués que je ne maîtrise pas encore mais que tout le monde semble avoir intégré, comme une sorte de seconde langue pleine de termes ultra-savants et tout et tout), que nenni ! Nous parlons loisirs, famille, échangeons quelques anecdotes de patients, quelques histoires de chasse, des histoires drôles… bref, un pur moment convivial autour d’un bon repas en terrasse. Et là, je commence à percevoir que, alors que je pensais exercer ma spécialité dans mon cabinet, un peu isolé, vivant des choses que j’étais sûrement un peu le seul à vivre, nous sommes nombreux dans cette spécialité et appartenons, sans doute sans vraiment s’en rendre compte, à cette grande famille qu’est la médecine générale. Je ne suis pas seul sur le bâteau.

De retour à l’hôtel, je jette un coup d’œil au programme des séances du lendemain et sélectionne les thèmes qui m’intéressent. Il est donc temps de dormir… Oui, mais bon, je peux lire un peu… j’ai un bon bouquin que je viens d’acheter, ce serait dommage de ne pas le commencer…

A l’aube du deuxième jour de congrès, mon troisième sur place, et après un petit déjeuner en terrasse également (oui, il faut le signaler parce que pendant ce temps-là, à Lille, il fait moche… n’est-ce pas ma chérie ?), je me remets en route pour le Palais des Congrès de Nice (promenade digestive de 5 minutes sous le soleil, on a connu pire comme trajet). Bon, j’avais mis la veste pour faire sérieux… l’année prochaine, j’en prendrai une climatisée.

Et la deuxième journée s’égraine comme la première, au gré de communications orales et d’ateliers enrichissants. Pendant les pauses, toujours de nouvelles connaissances (heureusement que nous avons tous un badge avec nos nom et prénom, parce que retenir tous ces nouveaux noms en si peu de temps, je n’y arriverai pas ! Je suis vraiment pas doué pour ça…).

Le soir venu, les chefs de clinique nous ont organisé une soirée sympa. J’ai hésité à y aller : on ne le croirait pas mais en fait je suis hyper timide... Je m’occupe de mon détail choc (puisqu’il en fallait un).
Mince ! Il est pas assez choc… la lentille violette ne se voit pas beaucoup finalement. J’ajoute un peu de crayon style Orange mécanique… C’est con, je me suis retrouvé dans le rayon maquillage du supermarché à chercher ce qui allait le mieux convenir… et je n’ai pensé qu’après la soirée au fait que je n’avais pas de démaquillant…
Petit détour le long de la plage, en compagnie de Sébastien, méconnaissable (il l’a réussi son détail choc !). A tel point que je me demande si les lunettes de soleil que j’arbore (pour cacher le détail choc) sont vraiment nécessaires.

Nous voici arrivés au restaurant. Tout est remarquablement organisé. Je suis là à la fois pour le plaisir, mais un peu pour le travail aussi, je dois l’avouer. Il faut que j’aille saluer tout le monde, me faire « identifier » pour que certains puissent mettre un visage sur mon nom. C’est quand même un peu plus sympa, et surtout plus humain, quand le reste de l’année on se contacte par courriels.

Retour à la table… Quelques tweets… J’apprécie les choix musicaux (oui, oui, je suis de la génération 80). Du coup je me lève et je danse (oui vous avez bien lu… moi… je danse… bon, j’avais bu quelques verres, ça aide à se sentir moins ridicule…)
Je discute avec toutes ces nouvelles connaissances que je suis ravi d’avoir eu la chance de faire. Et puis j’espère qu’ils ne me trouvent pas trop collant. On ne se refait plus.

Arrive le moment où quelqu’un (je ne sais plus qui de la bande) lance « On va se baigner ? ». Il faut dire que certains n’ont pas attendu que l’on se décide pour y aller.
Et il semble même que le maillot de bain soit un accessoire pas forcément indispensable…
Je ne suis pas très pudique, mais je regrette quand même de ne pas avoir pensé à en prendre un…
Du coup, je me replonge dans la timidité, la peur encore d’être trop collant, je laisse les autres aller au bord de mer et je les regarde se baigner (ils ont pensé à leur maillot, eux). J’aime bien l’ambiance de cette soirée.

Jusqu’au moment où quelqu’un me lance « Allez Matthieu, viens ! » sur un ton que mon petit cerveau décrypte comme un « allez, reste pas tout seul dans ton coin ! ». Elle a raison. Je le sais. Oh et puis, tant pis, j’y vais. Se baigner en boxer, c’est pas la mort… et puis l’eau et bonne… et puis je me lâche… et puis le monde ne s’écroule pas pour autant… je lâche la carapace trop sérieuse…
Et je me remets à réfléchir et à me dire que si les journées sont un enrichissement et une formation professionnels indiscutables, les soirées sont un enrichissement humain extrêmement agréable. Même plus, indispensable.

Retour à l’hôtel, téléphone main droite pour tweeter, boxer mouillé main gauche (et je ne suis pas le seul dans ce cas dans la rue, ça fait plaisir, j’avoue). Quand j’arrive à l’hôtel, et que je demande un taxi pour le lendemain matin, je mets quelques minutes à comprendre pourquoi l’hôtesse me regarde bizarrement… Espérons que le maquillage parte à l’eau et au savon…

Le samedi matin arrive : il est temps de reprendre l’avion pour Lille (au fait, il fait quel temps là-bas ?). A l’aéroport, bonne surprise, en attendant d’embarquer, on rediscute avec ces nouvelles connaissances que je suis tellement content d’avoir faites. Tellement content que pour leur dire au revoir, je leur fais la bise. Ben oui, je me lâche, on est tactiles dans le nord. On est tactiles aussi dans mes racines tout au sud. Deux raisons-excuses.

Dans l’avion qui me ramène auprès des miens et que j’ai hâte de revoir, je passe en revue tous les évènements. Mon appréhension d’avant congrès n’est plus qu’un souvenir me faisant sourire tant elle n’était pas justifiée. Et pourtant je sais que je la revivrai au prochain congrès. Je rentre avec plein d’éléments me permettant, je l’espère, d’être un meilleur médecin, ou en tout cas, d’avoir envie de le devenir.

Je ne peux m’empêcher de penser à ce sentiment d’appartenance à cette famille qu’est la Médecine Générale. Je m’en étais déjà un peu rendu compte… mais pas autant…

Et si tous les médecins généralistes français en prenaient conscience ? Quel formidable poids aurions-nous ! Notre spécialité si souvent décriée serait alors défendue par un nombre incroyable de représentants, plus passionnés les uns que les autres !

Je finis alors, sourire aux lèvres, en paraphrasant le Général De Gaulle (oui, quand j’ai peu dormi pour cause de bringue arrosée, j’en deviendrais presque mégalo) « Le jour où les médecins généralistes s’éveilleront… »… en espérant être présent ce jour-là !

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